Henri Manguin (1874-1949), "La femme au carrick, Jeanne", hiver 1903-1904, huile sur toile, signée, 73,5x60,5 cm
Nous remercions M. Jean-Pierre Manguin d'avoir confirmé l'authenticité de cette œuvre.
Bibliographie : Pierre Cabanne, Manguin - Hommage de André Dunoyer de Segonzac et Charles Terrasse, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1964, p. 101, no. 64, ill.; Lucille et Claude Manguin, Henri Manguin : Catalogue raisonné de l'œuvre peinte, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1980, p. 69, no. 100, ill.
Provenance : Madame E. Druet, Paris, novembre 1907 (Druet no. d'entrée : 4093), (acquis auprès de l'artiste); G. Couturat, Paris, c. 1925, puis resté dans la famille jusqu'à ce jour
Exposition : Société des Artistes Indépendants, 21e exposition, Grandes Serres de la ville de Paris, 1905, no. 2647 (sous le titre "Portrait" ); Manguin, Galerie E. Druet, Paris, 1910, no. 29; Les Fauves, Kunsthalle, Berne, 1950, no. 67; Manguin, Musée des Beaux-Arts, Neuchâtel, 1964, no. 32, ill. (daté 1905); Henri Manguin, Städtische Kunsthalle, Düsseldorf, 1969, no. 30 (daté 1905); Henri Manguin, Neuer Berliner Kunstverein, Berlin, 1970, no. 31 (daté 1905); Manguin - La volupté de la couleur, Fondation de l'Hermitage, Lausanne, 22 juin au 28 octobre 2018, cat. exp., Gallimard, Paris, 2018, p. 49, cat. 13
Etiquettes au verso : Galerie Druet, Paris, no. 4093; Kunsthalle, Berne, no. 0432; Fondation de l'Hermitage, Lausanne
Note : Œuvre peinte rue Boursault, Paris
Très bon état général
Le montage semble d'origine, très bonne tension de la toile et très bonne planéité, légère marque de la traverse centrale cotée couche picturale
Couche de préparation blanche, très bonne adhésion de la couche picturale
Présence de quelques empâtements au niveau du chapeau du visage et du col
Très bon état de la couche picturale, quelques griffures superficielles mineures :
-Une petite dans l'angle inférieur droit, le long du châssis
-Une sous le col, fine superficielle sur environ 4 cm
-Une en bas de l'épaule sur 1 cm (petite trace de choc avec léger enfoncement - mineur
-Une de 2 mm dans l'angle inférieur droit, dans les verts. (mineures)
Quelques micro-lacunes dans la veste (mineures)
Une petite usure pouvant être d'origine sur la pommette à droite sur 2mm
Tres belle fraîcheur des couleurs, uniformité de la brillance
Nous n'avons pas trouvé de trace de restauration sous lumière UV ou en lumière naturelle
Henri Manguin (1874-1949)
Henri Manguin est à l'origine du mouvement fauviste avec ses amis Marquet, Matisse, Valtat et Cézanne. Comme eux, il est fasciné par les couleurs vives et intenses du Midi, qu’il découvre en 1904 lors d’une rencontre déterminante avec Paul Signac à Saint-Tropez. Les
paysages méditerranéens constituent une étape essentielle dans le processus de libération de la couleur et de la naissance des Fauves.
L'oeuvre que nous présentons en vente est un témoignage rare des prémices de ce mouvement très prisé des collectionneurs. « La femme au Carrick » représente un sujet cher à l'artiste en la personne de Jeanne, son épouse. Cette oeuvre novatrice est exposée pour la première fois au public en mars 1905 lors de la 21e exposition de la Société des Artistes Indépendants de Paris, créée à l’époque pour
contourner la censure du Salon Officiel de Paris.
Cette même année 1905, en octobre lors du Salon d’automne au Grand-Palais, va naître officiellement le Fauvisme au travers d'un scandale : le président Loubet refuse d’inaugurer la salle VII, jugée sévèrement par l’ensemble des critiques et qualifiée de « cage aux fauves ». On parle de « bariolages informes », de « brosses en délire », « de mélange de cire à bouteille et de plumes de
perroquet ».
La peinture est appliquée par de larges touches de couleur à peine mélangées, déposée telles qu'elles sortent du tube, technique qui sera au coeur des polémiques dès son apparition. Cette toile est empreinte d’une force expressive dégagée par le regard franc et incisif du modèle.
L'expression pénétrante de « La femme au Carrick » est amplifiée par l’utilisation des rouges et des verts, couleurs opposées sur le
cercle chromatique, même sur les chairs. Manguin pousse le contraste d’une manière novatrice en divisant verticalement l'arrière-plan en 2 couleurs. Étonnamment, de ce combat de couleurs se dégage une harmonie paisible et une sensualité du modèle. Ce n'est pas sans raison que Manguin fut élogieusement surnommé par Apollinaire "Le peintre voluptueux".
COLLECTION GEORGES COUTURAT (1890-1948)
Grand marchand, mécène et collectionneur de la première partie du XXème siècle, Georges Couturat était un ami des peintres. Grand-oncle des propriétaires actuels suisses par alliance d'une famille patricienne vaudoise, il a oeuvré pour valoriser le travail des artistes de la modernité comme Manguin, Camoin, Cross, Signac, etc...
Il a constitué une extraordinaire collection de plusieurs centaines d'oeuvres dans son appartement parisien incluant l'un des chef d'oeuvres de Caillebotte,"L'homme au balcon".
En tant qu’esthète, il n’hésitait pas à prodiguer ses conseils aux artistes au cours de leurs processus de création. Plus qu’un conseillé pour certains, sa relation avec Manguin pouvait s’apparenter à celle d’un confident, confortant ce dernier dans ses moments de doute, il l’aida à établir sa propre peinture.
Toutes les oeuvres provenant de cette collection et marquées en bleu dans le catalogue papier (lots 17 à 35 et 2106 à 2226) ont été conservées par descendance dans la famille jusqu'à ce jour.